top of page

2

Consommer moins mais mieux 

       L’essor de la personnalisation en cosmétique est aussi induit par une modification dans les modes de consommation. En moyenne, une femme utilise 12 produits de beauté par jour, ce qui représenterait en prime une totalité de 168 composants chimiques d’après Environmental Working Group (Sara Tascon, 2020). Les consommateurs sont à la recherche du (ou des) produit(s) “miracle(s)” pour réussir à obtenir la peau "parfaite", si tant est que ce soit possible. Ils testent alors de nouveaux produits, en vain. Et pour cause ? Nous sommes souvent influencés par les packagings des produits aux couleurs attractives et aux slogans très alléchants, comme en témoignent les publicités ci-dessous.

Vous m'en faites la promesse ?

Comme l'illustrent ces publicités de grandes marques de la Beauté, ces dernières n'hésitent pas à faire de nombreuses promesses en s'appuyant sur des expressions engageantes pour les consommateurs telles que "peau parfaite" comme ci-dessus chez Garnier. Filorga nous promet elle de remonter le temps ! Les chiffres et le champ lexical scientifique sont aussi largement utilisés avec des termes tels que "preuves" (publicité de la marque Clinique), "dermatologique" ou encore "cliniquement prouvé". Attirant, n'est-ce pas ?

       Les marques parlent de “peau parfaite”, de “preuves”, de “remonter le temps”, promettent de diminuer considérablement les rides. Comment ne pas se laisser tenter et ne pas espérer au moins un minimum de résultats sur la peau avec de telles promesses ? Les arguments sont souvent appuyés par des chiffres ou des termes scientifiques qui donnent du poids aux propos et que les consommateurs ne peuvent pas facilement vérifier. Il en va de la confiance et de la légitimité que les consommateurs donnent aux marques. Or, cette confiance tend à se perdre puisqu’une forme de réticence se fait ressentir chez les consommateurs. Une des tendances structurantes observées par Les Echos Études (Le renouveau des business model de la beauté, septembre 2020) est une crise de confiance envers les grands groupes et grandes marques. Cela se manifeste par une attitude bien plus détachée et une prise de recul des consommateurs vis-à-vis des stratégies marketing mises en place, dont l'efficacité n’était pourtant plus à prouver jusque-là. Les consommateurs se tournent de moins en moins vers les cosmétiques conventionnels pour privilégier les petites marques artisanales, le “fait maison” et le Do It Yourself (DIY), dont ils maîtrisent alors le processus de fabrication et la composition. A ce titre, l’offre de cosmétiques personnalisés semble répondre parfaitement à ce besoin de transparence. La promesse devient ici très claire : trouver le produit adapté à nos besoins cutanés. Les formules sont alors directement pensées pour le client, qui en prend conscience et peut connaître la composition de son produit. Il n’a alors plus besoin de tester X produits avant de trouver celui qui lui convient. Cette tendance à la personnalisation permet de ce fait une simplification des routines de soin. Non seulement ma routine est unique, elle me ressemble, mais elle se compose maintenant de peu de produits. Ce changement de comportement rejoint alors une tendance “Slow Cosmétique” où le consommateur prend le temps de choisir ses produits en prenant en compte de nombreux critères. Il cherche à consommer moins mais mieux, c’est-à-dire de meilleure qualité, avec une formulation plus sûre, plus noble, plus simple, dépourvue d’ingrédients jugés nocifs pour la santé. C’est d’ailleurs un des arguments utilisés par les marques en cosmétiques personnalisés comme l’illustre cette publication de la marque Laboté sur le réseau social Instagram : 

 

Consommer moins mais mieux !

Dans ce post Instagram, Laboté associe son offre de soins personnalisés à une simplification des routines skincare. 

Elle invite les consommateurs à privilégier une consommation responsable de la cosmétique. 

Une plus grande méfiance vis-à-vis des compositions

 

       En effet, le deuxième problème soulevé ici est la composition parfois douteuse de nombreux produits cosmétiques : benzyl salicylate, butylphenyl methylpropional, ethylhexyl methoxycinnamate, etc. Quels sont ces composants aux noms imprononçables ? Le consommateur informé souhaite pouvoir se contenter d’un minimum de produits dont les propriétés répondent à ses problématiques de peau, tout en respectant sa santé et l’environnement. La tendance est à la simplification de nos routines de soin, pour ne garder que les gestes essentiels qui font réellement du bien et une différence à la peau ; il y a notamment une hausse de l’utilisation d’applications mobiles, telles que Yuka ou Clean Beauty, qui permettent de vérifier la composition des produits et ainsi de réaliser ses achats avec plus de transparence (Les Echos Études, Le renouveau des business model de la beauté, septembre 2020). Opter pour la personnalisation, c’est avoir la possibilité de comprendre ce qui se cache derrière l’efficacité du produit. C’est alors faire le choix de ne plus utiliser un nombre trop important de tubes de crèmes aux promesses souvent similaires, dont nous ne connaissons finalement pas l’efficacité réelle sur la peau. En effet, sondage IFOP réalisé en 2020 pour la marque de soins personnalisés Laboté révèle que 46% des Français.e.s avouent jeter un produit cosmétique avant qu’il ne soit terminé, car il ne répond pas à leurs besoins (les produits sont “inadaptés à leur peau”, “l’efficacité n’est pas toujours au rendez-vous” et “la texture ou le parfum ne conviennent pas” constituent les trois premières raisons décelées lors de l’enquête). L’idée est de trouver LE produit irremplaçable afin de ne plus gaspiller et donc de consommer moins mais mieux. Cette tendance à la personnalisation s’est aussi développée en parallèle d’un niveau accru de renseignement des consommateurs. En 2013, l’institut Noteo informe que sur 15 000 produits testés, 40% d’entre eux contenaient au moins un perturbateur endocrinien (qui interfère avec la régulation des hormones). En 2016, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) publie les résultats de son enquête sur les cosmétiques. Sur 700 produits analysés, elle alerte sur le fait que 37% ont une composition “non conforme” et 15% ont même une composition dangereuse (DGCCRF, Contrôle des produits cosmétiques 2016) ! Ces études, entre autres, ont permis de donner plus de transparence sur les cosmétiques, au profit du consommateur. Ce dernier a pu s’aider de la plateforme YouTube (sur laquelle des influenceurs spécialistes en cosmétologie partagent leurs expertises) et d’applications mobiles, lui permettant de décrypter les compositions des cosmétiques, ou encore de contenus publiés par les marques elles-mêmes, notamment en cosmétiques personnalisés.

Décriptez les étiquettes !

Julien Kaibeck, fondateur du mouvement Slow Cosmétique, aide le Youtubeur Cut By Fred à décrypter la composition de ses produits préférés et explique à quel point il faut se montrer vigilant devant le discours parfois trompeur des marques.

Cette vidéo vient témoigner du besoin des consommateurs de comprendre ce qui se cache derrière la composition de leurs produits.

Laboté invite les consommateurs à se pencher sur la composition des produits qu'ils utilisent.

Cette publication s'inscrit dans une démarche de transparence de la marque.

 

       Le consommateur est devenu “client expert” et acteur de ses choix en matière de cosmétiques. Il n’hésite pas à remettre en cause les conseils fournis par les conseillers en boutiques, instituts mais aussi ceux donnés en pharmacies et parapharmacies. Ariane Goldet affirme, au sujet de la personnalisation en cosmétiques, que : “je l’ai vu arriver à ce moment là où les filles désertaient un petit peu les parfumeries parce que les conseillères n'étaient pas toujours top” (Annexe I). Le consommateur est plus et mieux renseigné et pense être en mesure de comprendre et savoir ce qui est bon pour sa peau. Cette recherche d’informations est motivée par ce désir de trouver le produit adapté à ses besoins, et non plus simplement celui de suivre l’avis d’un conseiller potentiellement peu renseigné. Pour autant, tous les consommateurs ne se considèrent pas suffisamment informés et pourraient avoir peur de faire le mauvais choix. Une offre de produits personnalisés s'avère donc être une solution intéressante pour pallier un manque d’informations sur les produits existants et la garantie de trouver le produit qui nous correspond. Le client se laisse en effet guider par les marques dans la définition de son produit.

Quand la personnalisation devient un reflet des engagements des consommateurs

      Les cosmétiques personnalisés s’inscrivent donc dans une logique plus large de consommer plus respectueusement, que ce soit pour soi ou pour l’environnement. Nous sommes entrés dans une ère où les achats reflètent les engagements et les convictions, comme le véganisme, le bio, ou la valorisation de minorités ethniques par exemple. Nous n’achetons pas seulement un produit mais une marque, ses valeurs, un sourcing. Tout achat est désormais une prise de position, consciente ou non : le consommateur est acteur et, qu’il le veuille ou non, il joue un rôle dans le monde complexe de la consommation. L’accès à l’information est si développé que le consommateur peut difficilement ignorer les agissements de certaines marques ou les causes qu’elles soutiennent. Ainsi, acheter une crème de jour n’est pas si anodin que ce qu’il n’y paraît. Pour Ariane Goldet : “aujourd’hui un produit de beauté c’est presque un engagement” (Annexe I). Elle englobe d’ailleurs dans le sur-mesure tout ce qui se rattache aux convictions du consommateur : “Dans le sur-mesure à mon avis il y a aussi mes convictions, ma philosophie de la cosmétique, ma philosophie de l’environnement, ma philosophie de la santé de la planète, de l’écologie.” (Annexe I). De ce fait, la personnalisation est rattachée dans l’inconscient collectif à un mode de consommation plus responsable, qui veille à un choix juste et réfléchi des ingrédients pour une composition des produits dite “clean”. Nous pouvons citer Typology, marque de cosmétiques créée en 2019, qui se revendique être une marque transparente sur ses ingrédients, que ce soit au sujet de leur provenance, des méthodes d’extraction, de production, des potentiels effets sur la peau et sur le corps. La marque est décrite comme étant “vegan, cruelty free, natural, online only” et comme “révolutionnant l’univers des cosmétiques” (L’Echo, Janvier 2020). Consommer des produits Typology s’apparente ainsi à un engagement du consommateur à se détacher des marques conventionnelles et à opter pour des alternatives plus responsables. C’est témoigner de son engagement pour la question environnementale mais aussi de ses préoccupations relatives à la composition des produits que le client appliquera sur sa peau. C’est une manière de s’allier au point de vue du fondateur Ning Li, dont l’idée de créer Typology lui est venue de son incapacité à trouver des produits cosmétiques auxquels il faisait confiance. C’est un message fort qu’il envoie à travers sa marque, très révélateur finalement de ce changement de comportement constaté ces dernières années chez les consommateurs.

PFE engagm.png

La transparence selon Typology

La marque communique sur la simplicité de ses formules et sur l'attention portée au choix des ingrédients.

 

bottom of page